Les jeunes hommes, traditionnellement favorisés par rapport à leurs consœurs sur le marché du travail, bénéficient également, lorsqu’ils sont issus d’une formation fortement féminisée*, d’un avantage certain en termes d’insertion professionnelle.
Une communication de Thomas Couppié et Dominique Epiphane, chargés d'études du Céreq, lors des XXIIèmes Journées du Longitudinal.
1) Emplois n’ayant pas de correspondance entre métiers ciblés par la formation et métiers occupés après la sortie de formation initiale. Indicateur calculé uniquement sur la Génération 2010.
2) Exemple : emplois d’employés ou d’ouvriers non qualifiés occupés par les titulaires d’un CAP ou d’un BEP.
Tandis que, depuis près de quarante ans, l’orientation des jeunes femmes vers les bastions masculins est largement encouragée par les politiques publiques, l’arrivée des jeunes hommes dans les professions féminisées n’est en revanche pas le fruit d’une volonté politique. Par ailleurs, si la féminisation d’une profession est souvent vécue comme une dévalorisation, la présence des hommes semble au contraire offrir un gage de revalorisation de celle-ci. Ainsi, l’appartenance à l’un ou à l’autre groupe de sexe ne joue pas de la même façon dans l’un et l’autre cas. Alors que les hommes sont en général bien accueillis dans les collectifs de travail féminins, les femmes doivent au contraire souvent faire face à de fortes résistances et prouver leur légitimité dans les bastions masculins.
Les résultats de nos dernières études montrent que les modalités d’insertion des hommes dans des professions « féminines » et celles des jeunes femmes dans des professions « masculines » ne sont pas non plus de même nature.
Les jeunes hommes, traditionnellement favorisés par rapport à leurs consœurs sur le marché du travail, bénéficient également, lorsqu’ils sont issus d’une formation fortement féminisée, d’un avantage certain en termes d’insertion professionnelle : les conditions de leur transition école-emploi sont en effet relativement meilleures que celles des jeunes femmes issues des mêmes formations. Leurs probabilités d'échapper au chômage, d'éviter un emploi à temps partiel, d'accéder aux catégories socioprofessionnelles les plus valorisées et de percevoir les salaires les plus élevés, sont toujours supérieures à celles des jeunes femmes.
Par ailleurs, les jeunes hommes ne sont pas pénalisés lorsqu’ils occupent un emploi en dehors de ceux visés par la formation. Ils sont en effet nettement plus nombreux que les jeunes femmes issues des mêmes formations à exercer, au premier comme au dernier emploi, une activité déconnectée de leur formation initiale. Toutes choses égales par ailleurs, la probabilité pour un jeune homme d’être sur un « emploi cœur » est 1,3 fois inférieure à celle d’une jeune femme au premier emploi, et de 1,6 fois au dernier emploi observé.
De plus, alors que les jeunes femmes diplômées de filières techniques et scientifiques sont fortement desservies lorsqu’elles n’intègrent pas le cœur des métiers, ce n’est pas le cas des jeunes hommes des filières fortement féminisées. Ainsi pour eux, des destins professionnels diversifiés se conjuguent à des niveaux d’emplois globalement plus élevés et des probabilités plus fortes d’échapper au déclassement. De même, ils bénéficient de meilleures rémunérations que leurs consoeurs, même si la cible professionnelle atteinte n’est pas en lien avec leur formation.
(*) Est considérée comme formation fortement féminisée une formation à l'issue de laquelle les hommes représentent moins de 35 % des sortants. Leur proportion s'élève en moyenne à 17% des diplômés.
Pour en savoir plus :
"Les jeunes hommes dans des formations très féminisées : quelles destinées professionnelles ?", p 433-445, Thomas Couppié et Dominique Epiphane in Alternance et professionnalisation : des atouts pour les parcours des jeunes et les carrières ? Relief, n° 50, 2015, 480 p.
Les débuts de carrières des femmes diplômées des filières scientifiques - "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme" ? Thomas Couppié, Dominique Epiphane. Net.Doc, n° 155, 2016, 25 p.
Les études du Céreq sur les Inégalités et discriminations
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