Calificaciones y empleo, n° 116, Novembre 2021, 4 p.

Mujeres gerentes al inicio de sus carreras: una legitimidad a conquistar

Publié le
12 Novembre 2021

Con mayor nivel educativo que los hombres, hoy las mujeres jóvenes se han puesto al día en el acceso a puestos gerenciales al comienzo de sus carreras. Sin embargo, las funciones de gestión siguen estando desigualmente distribuidas entre los sexos. Una desigualdad que se ejerce en los criterios de selección, el sector de actividad, el salario y el grado de responsabilidad, subrayando así la persistencia de estereotipos de género en los niveles más elevados de la jerarquía profesional.

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Un accès aux fonctions de manager moins aisé pour les femmes

Sept ans après avoir quitté le système éducatif, la proportion de femmes diminue à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie des professions : elles représentent près de 55% des sortant·es de l’enseignement supérieur en 2010, mais seulement 40% des managers en 2017 (cf. tableau 2). Elles accusent donc toujours un déficit d’accès à ces emplois, et l’écart constaté après 3 ans de vie active s’est renforcé avec le temps. Non seulement elles accèdent moins à ces positions mais, lorsque c’est le cas, elles y arrivent plus tardivement : le délai moyen avant d’occuper pour la première fois ce type de fonction est de 15,3 mois pour les hommes et 17,9 mois pour les femmes.

Même si, globalement, les jeunes femmes sont majoritaires parmi les diplômé·es de l’enseignement supérieur, elles ne parviennent pas, aussi bien que les hommes, à convertir leur capital scolaire en poste de manager et ce, à l’issue de la majeure partie des filières de formation. En effet, alors qu’elles représentent 65% des diplômé·es de Lettres, Sciences humaines, Gestion et Droit, seules 48% des titulaires de ces diplômes occupent un poste de manager au bout de 7 ans. De même, alors qu’elles représentent 29% des diplômé·es des écoles d’ingénieurs – autre filière conduisant le plus sûrement et le plus rapidement à ces postes —, elles ne sont plus que 15% parmi celles ou ceux devenu·es managers en 2017 (cf. tableau 2).

Ces constats sont confirmés par les modèles toutes choses égales par ailleurs : quel que soit le niveau de diplôme du supérieur (masters toutes spécialités, écoles d'ingénieurs, bac+3...), les jeunes hommes enregistrent systématiquement un avantage comparatif dans l’accès à ces professions. Le seul diplôme qui assure un avantage relatif aux femmes pour occuper une fonction hiérarchique au bout de 7 ans est un doctorat en sciences.

Au total, à nombre de mois d’expérience, connaissance de l’employeur, localisation, parcours scolaire et type de diplôme équivalents, les hommes ont 1,75 fois plus de chance d’accéder à un emploi de cadre hiérarchique que les femmes. Par ailleurs, comme si les employeurs avaient besoin de gages supplémentaires pour vaincre des présupposés sexistes, certaines expériences, comme le fait d’avoir effectué un long séjour à l’étranger pendant ses études ou de connaître avant son embauche quelqu’un dans l’entreprise, favorisent l’accès des femmes à ces postes mais sont sans incidence pour les hommes.

Les managers, hommes comme femmes, sont plus souvent parents que l’ensemble de la Génération mais ceci est particulièrement notable chez les hommes (cf. tableau 2). L’assise matérielle liée au statut de ces professions semble faciliter pour ces derniers la possibilité de fonder une famille, à moins que ce ne soit, au contraire, le fait de devenir père qui, attisant leur sentiment de responsabilité familiale, booste leur ambition professionnelle et donc leurs débuts de carrière.

Des perceptions genrées de la fonction de manager

Si tou·tes les managers ont bien une fonction hiérarchique, seul·es 52% ont pour mission principale l’encadrement d’une équipe. Cette proportion est plus forte chez les hommes que chez les femmes (respectivement 55% et 48%). Par ailleurs, ils dirigent plus souvent des équipes de plus de 10 personnes que leurs consœurs (30% contre 24%).

D’un point de vue sectoriel, même si la majorité de ces cadres exercent au sein du secteur privé, les femmes managers travaillent beaucoup plus fréquemment dans le secteur public que leurs confrères, en particulier dans l’administration publique et la fonction publique hospitalière (cf. tableau 3). Elles sont donc plus souvent fonctionnaires (11% versus 5%) et occupent plus fréquemment des professions scientifiques (+11 points), et de cadres de la fonction publique (+9 points). Dans le secteur privé, tandis qu’elles exercent un peu plus souvent que leurs confrères une profession libérale (+3 points) ou occupent un poste de cadre administratif et commercial d’entreprise (+7 points), ces derniers, en revanche, accaparent plus des deux tiers des postes d’ingénieurs et cadres techniques des entreprises.

Ces disparités dans la répartition des métiers sont assorties de perceptions différentes de l’emploi actuel. Ainsi, les hommes managers ambitionnent plus souvent d'accéder à des fonctions ultérieures plus prestigieuses encore : un tiers d’entre eux contre un quart des femmes déclarent que leur poste actuel constitue avant tout un « tremplin pour accéder à de plus hautes responsabilités futures » (cf. tableau 4). Leur assurance et conviction d’être à leur place peut également se lire à travers la forte majorité qui déclare n’avoir bénéficié d’aucun appui pour accéder au poste qu’ils occupent au moment de l’enquête (62% d’entre eux contre 51% des femmes) ; l’écart augmentant même au sein de ceux et celles dont l’encadrement est la fonction principale (67% versus 51%). Que les hommes activent moins leurs réseaux pour accéder à ces postes, qu’ils aient moins conscience de l’avoir fait ou encore qu’ils soient moins disposés que leurs consœurs à le mentionner, cela traduit la même asymétrie genrée dans l’accès aux fonctions managériales. En d’autres termes, l’arrivée dans ces postes serait plus marquée et marquante pour les femmes que pour les hommes.

Si beaucoup de managers déclarent « se réaliser tout à fait professionnellement », c’est plus souvent le cas des hommes. Ce sentiment, variable selon la profession exercée, l’est également selon le genre : ainsi, 62% des hommes cadres ou professions scientifiques dans la fonction publique expriment leur satisfaction contre moins de la moitié de leurs consœurs. Il existe un écart de même ampleur au sein des ingénieur·es et cadres techniques, alors que ce sentiment est assez partagé chez les cadres administratifs ou commerciaux (cf. tableau 4).

Un empiètement sur la vie familiale moins bien vécu par les femmes

Outre la réalisation professionnelle, plusieurs indices laissent supposer une plus grande insatisfaction chez les femmes managers. Elles sont plus nombreuses à s’estimer « mal ou très mal payées », en particulier lorsque leur fonction principale est l’encadrement. Ceci laisse entendre que cette tâche n’est pas – ou ne leur paraît pas – toujours reconnue à sa juste valeur. Elles souhaitent également plus souvent quitter leur emploi actuel et se déclarent à la recherche d’un autre emploi. Enfin, et ceci explique sans doute en grande partie cela, elles sont plus nombreuses à considérer que le travail prend trop de place dans leur vie mais surtout, lorsque c’est le cas, à envisager de remédier prochainement à cette situation (cf. tableau 4).

À l’exception des ingénieur·es, considérer que le travail prend trop de place dans la vie est toujours davantage le fait des femmes, les écarts les plus forts s’observant au sein des professions libérales et, dans une moindre mesure, au sein des professions scientifiques et des cadres administratifs et commerciaux d’entreprises (cf. tableau 4).

Globalement, ceci est à mettre en rapport avec leur vie familiale, car elles sont plus nombreuses à avoir des enfants que les managers hommes. Or celles-ci ont d’autant plus tendance à déclarer, quand elles sont mères, que le travail prend beaucoup trop de place dans leur vie. Paradoxalement, c’est l’inverse pour les hommes, les pères se plaignant un peu moins que leurs collègues sans enfant d’un débordement du temps de travail sur leur vie personnelle.

Cette difficile articulation des temps sociaux, quand elle est vécue par les femmes, est souvent corrélée avec l’intention de quitter son emploi et/ou d’en rechercher un autre. La constance masculine à vouloir plutôt préserver le leur, qu’ils évoquent des problèmes de conciliation ou pas, n’est mise à mal que lorsqu’ils estiment que leur salaire n’est pas à la hauteur de ce qu’il devrait être.

Des rémunérations qui reflètent les différences de positionnement professionnel

Si les salaires d’embauche, dans l’entreprise qui a permis l’accès à un premier poste de manager, sont quasiment équivalents entre hommes et femmes, il n’en est plus de même sept ans après la sortie du système éducatif. à conditions d’emploi identiques, les femmes cadres hiérarchiques touchent en moyenne 9% de moins que leurs homologues masculins. Au sein des managers, les femmes sont moins présentes parmi les plus hauts salaires et, à l’inverse, le sont davantage parmi les plus bas. Ainsi, alors qu’elles constituent 38% des managers à temps plein, elles représentent 49 % des managers payé·es en deçà du premier quartile de la distribution et seulement 32% des mieux rémunéré·es (au-delà du dernier décile).

Certaines responsabilités d’encadrement ne sont pas valorisées de la même façon selon le genre. Tandis que les hommes bénéficient d’un bonus d’environ 200 euros mensuel lorsque l’encadrement constitue leur mission principale ou lorsqu’ils supervisent des équipes supérieures à 10 personnes, ce n’est absolument pas le cas pour leurs consœurs. Ainsi, pour les managers dont l’encadrement des équipes est la fonction principale, c’est dans le secteur privé que les disparités entre hommes et femmes sont les plus fortes avec un écart de salaires médians d’environ 300 euros en faveur des premiers.

Quand valorisation de la fonction de manager il y a, elle s’appuie souvent sur une composante variable de la rémunération, sous diverses formes (primes de performance, intéressement, etc.), dont les femmes managers bénéficient moins. Cela s’explique par leur plus grande présence dans le secteur public, lequel est moins prodigue en attribution de parts variables (40% du personnel est concerné contre 54% dans le secteur privé). En outre, disposer d’une part variable dans le secteur privé assure aux hommes un meilleur gain de rémunération lié au management (500 contre 240 euros pour leurs consœurs). Il n’en n’est pas de même dans le public où seules les femmes bénéficient d’un gain de rémunération.

Par ailleurs, l’examen des déterminants des salaires selon le genre est riche d’enseignements : toutes choses égales par ailleurs, le fait d’avoir obtenu un baccalauréat avec une mention Bien ou Très Bien, ou encore d’avoir effectué un séjour durable à l’étranger pendant leurs études, fait varier positivement le salaire des femmes, sans que ces effets soient tangibles pour les hommes. Et inversement, avoir des enfants à charge les pénalise sans qu’il en soit de même pour les hommes. Les femmes managers ne peuvent donc toujours pas, à caractéristiques similaires, prétendre aux mêmes niveaux de rémunération que leurs collègues masculins. Il semble qu’en effet, davantage de composantes et conditions inobservées ou informelles contribuent à définir les salaires masculins. Par exemple, en raison de la division du travail domestique et parental, les hommes sont encore et toujours supposés disposer plus largement de leur temps, travailler de façon extensive, ou encore être moins contraints par les différentes mobilités géographiques inhérentes à l’activité professionnelle et, au total, correspondent à la représentation commune de l’exercice d’un poste de manager.

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Les positions de pouvoir hiérarchique constituent ainsi, pour les femmes, une citadelle toujours difficile à conquérir. Elles doivent gagner leur légitimité, d’abord par des gages d’excellence et de performance que les entreprises mobilisent comme critères de sélection. Ceux-ci, par la suite, sont pris en compte dans la manière dont les employeurs reconnaissent, en espèces sonnantes et trébuchantes, leurs compétences. Ainsi, malgré les lois successives depuis les années 1970 en faveur de l’égalité de traitement des femmes et des hommes à fonction identique, les entreprises semblent toujours disposer de latitude pour différencier les affectations et les parcours professionnels, justifiant in fine des disparités sexuées de rémunération et ce, dès les premières années de la carrière. La publication rendue désormais obligatoire pour les grandes entreprises d’un index d’égalité salariale augure-t-elle de changements significatifs en la matière?

Citer cette publication

Dupray Arnaud, Epiphane Dominique, Mujeres gerentes al inicio de sus carreras: una legitimidad a conquistar, Calificaciones y empleo, n° 116, 2021, 4 p. https://www.cereq.fr/mujeres-gerentes-al-inicio-de-sus-carreras-una-legitimidad-conquistar